On distinguera six pronoms personnels en créole de Guadeloupe, trois à valeur singulier, trois à valeur pluriel. Chacun de ces pronoms peut être réalisé selon des formes "longues" ou des formes "courtes", qui correspondent d'ailleurs à des formes "fortes" ou des formes "faibles" (c'est-à-dire accentuées ou non accentuées).
Forme longue | Forme courte | |
---|---|---|
1ère personne | moin | an |
2e personne | vou | ou, -w |
3e personne | li | i, -y |
4e personne | nou | -- |
5e personne | zot | zo, zò |
6e personne | yo | -- |
Comme on le voit, il n'existe pas d'opposition masculin/féminin dans les pronoms de 3e ou 6e personne : "i vini" signifie aussi bien "il est venu" que "elle est venue" ; "yo ka travay", "ils travaillent" qu'"elles travaillent": c'est le contexte qui permet de savoir de qui il s'agit, et donc comment traduire en français, puisque le français nécessite un pronom différent en fonction du sexe du personnage dont on parle. Pour quelques remarques complémentaires sur les marques sexuelles en créole.
La forme longue peut se rencontrer partout : c'est celle que l'on pourrait recommander en toute position
à l'écrit pour faciliter la reconnaissance. Dans la production orale
usuelle du discours, on assiste à la répartition suivante :
an ka vini
ou ka vini
i ka vini
[pour "nou", "zòt" et "yo", pas de changement : on entend toutefois "zo" ou "zò"]
Dans le conte Ti-Chika, "zò" est attesté plusieurs fois. Ex : "Zò two mové. I sé on nonm kon tout nonm..." "
Dans le conte Ti-Chika, on trouve des exemples de cet usage alterné dans le discours des formes fortes et faibles des pronoms, selon leur position et leur valeur : "Vou, Ti Chika ou anvi mayé, é èvè fi a misyé Louwa. Ou pa gadé-w ? i pé ké jen vlé-w. Nou ké alé, vou ou ké rété isit."
En créole des Petites Antilles, comme on peut le voir, il y a un unique pronom de 2e personne, que l'on veillera selon les contextes à traduire par " tu " ou " vous ". L'opposition du français entre le " tu " familier et le " vous " plus neutre, n'existe pas en créole. Dans la traduction proposée de Zanba, Lapen, Tig épi Louwa nous traduisons " vou/ou/w ", les différentes variantes de la 2e personne du singulier : par " tu " quand des amis (Compère Zamba, Compère Lapin...) s'adressent les uns aux autres, mais nous avons choisi, comme les rapports sociaux peuvent l'impliquer, de rendre avec des " vous " les échanges avec le Roi.
On pourra comparer les pronoms personnels dans les divers créoles français.
Le pronom possessif est formé au singulier par ta + marque personnelle, au pluriel par séla + marque personnelle. Comme à l'accoutumée, devant une consonne nasale (m, n), ta et séla reçoivent une marque de nasalisation sur le "a" : ex. tan-moin, sélan-moin.
Ralph Ludwig, dans "L'abrégé de grammaire du créole guadeloupéen" qui introduit le Dictionnaire
créole-français de Ralph Ludwig, Danièle Montbrand, Hector Poullet, Sylviane Telchid,
édité par SERVEDIT/Editions Jasor en 1990, cite quelques exemples, pp. 18-19 :
"Mwen èvè Pòl, nouchak té ni on kaz ; i vann ta-y, an louwé tan-mwen" = Paul et moi avions chacun
une maison ; il a vendu la sienne, j'ai loué la mienne.
"Sé soulyé a-w la bon toujou, mé sélan-mwen chiré toupatou" : Tes Chaussures sont encore en bon état,
mais les miennes sont complètement abîmées.
On notera toutefois la tendance de plus en plus affirmée en créole de Guadeloupe à généraliser les
formes en "ta-", y compris au pluriel :
"Sé liv-lasa sé tan-mwen" = Ces livres sont les miens."
Ralph Ludwig (op. cit.) donne le tableau théorique suivant :
Nombre\Distance | Renvoi à un référent proche | Renvoi à un référent lointain |
---|---|---|
Singulier | sila | sala ; tala |
Pluriel |
On citera les exemples :
"Sila pli piti ki tala" = Celui-ci est plus petit que celui-là
"Séla pòkò bon" = Ceux-ci ne sont pas encore bons.
"Ni on pyé fouyapen ka pòté byen, mè sé-lasa an ni lidé yo kòklèch" = Il y a un arbre à pain qui
donne des fruits, mais ceux-ci, je pense qu'ils sont infertiles.
On notera toutefois que l'opposition proche/lointain comme l'opposition singulier/pluriel tendent à s'effacer, "sila" ou "séla" demeurent, tandis que le pluriel "sé-lasa" (ceux-ci, celles-ci), attesté anciennement, a presque totalement disparu (nous n'avons pas cru bon de l'introduire dans le tableau, même s'il figure dans le tableau donné par Ralph Ludwig). "Tala" est la forme la plus utilisée à la Martinique (et peut-être en Guadeloupe).
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