Les adjectifs

Les adjectifs en créole sont de deux types :

  • Des adjectifs antéposés, qui appartiennent à une classe fermée, et qui modifient le sens du nom qu'ils précèdent, de façon à en changer considérablement le sens :

    En fonction du lien sémantique entre les constituants adjectif et nom, la composition sera plus ou moins étroite, au point que l'on peut parfois se demander s'il faut encore parler d'adjectif pour la première partie, ou de "préfixe" d'un mot composé.

    Pour le créole antillais, on citera les éléments suivants, qui tous sont antéposables (certains comme "ti" ne sont qu'antéposables (cf. l'exemple précédent : postposé il devient "pitit", avec un sens différent, cette fois-ci physique, alors que "ti" a un sens plus moral ou affectif) : ti-, bèl, jène, vyé, gro, gran... On les appellera adjectifs de la classe 1.

  • Des ajectifs postposés qui peuvent être classés en deux catégories :

    On retiendra en outre que tout nom postposé à un autre nom le "qualifie", prend donc directement cette fonction d'adjectif, sans qu'aucune marque ne soit nécessaire : on moun Frans, on fanm Lapoint, timoun fwè-moin (donc mon neveu), fwè timoun-moin (donc mon fils)... On a donc, en créole, pour qualifier le nom, ce que l'on peut appeler des "compléments de nom". Mais alors qu'en français la postposition d'un nom qualifiant suppose fréquemment le recours à une préposition (cf. une tasse de café / une tasse à café, une maison de village, un fer à repasser, un maître d'école, etc., avec toutefois également en français contemporain une tendance de plus en plus affirmée à postposer directement un autre nom, déterminant par rapport au premier, déterminé : une robe Dior, un enfant modèle, etc.), en créole la construction est directe : quand deux noms se suivent, le second a valeur adjectivale.

    La postposition d'un "adjectif" en créole peut d'ailleurs nécessiter l'utilisation d'un relatif : on ne dira pas *"sé on moun pitit", mais "sé on moun ki pitit".

    C'est d'ailleurs à cause de ces phénomènes syntaxiques qui permettent d'isoler une classe de mots qui n'ont pas exactement le même fonctionnement que n'importe quel nom que l'on peut parler d'une catégorie de l'adjectif en créole antillais (de fait de "classes" d'adjectifs, puisqu'il convient de distinguer :

  • les adjectifs antéposables
  • les adjectifs qui supposent la présence d'un relatif "ki" pour être postposés au nom
  • et parmi eux une classe plus restreinte d'adjectifs qui admettent une variation en genre.

    Exercice n° 11 :

    On recherchera les adjectifs ou les éléments à fonction adjectivale dans le texte suivant (extrait de Don Jan de Georges Mauvois. On fera les commentaires qui s'imposent :

    JEAN - A ! Charlòt, man ka byen wè ou pòkò konnèt mwen. Kon ou ka jijé mwen dapré lé zòt, ou pa ka ba mwen vré valè mwen. Si ni moun ki foub asou latè, moun ki ka chaché kouyonnen jenn fanm, pa mété mwen adan souplé, é pa douté'w di sensérité mwen. Sé bèl ou bèl ki ka konté. Kon an moun fèt kon ou fèt la, i pa pou krenn ayen ; i alabri. Kwè mwen, ou pa ka sanm an moun yo sé pé abizé. E pou mwen menm, fwanchman pou di'w, man sé préféré pèsé tjé mwen mil fwa pito man sé kwè man trayi'w. (Acte 2, scène 2 : Don Juan à Charlotte)

    Texte original (Molière) : DON JUAN : Ah! Charlotte, je vois bien que vous ne me connaissez pas encore. Vous me faites grand tort de juger de moi par les autres ; et s'il y a des fourbes dans le monde, des gens qui ne cherchent qu'à abuser des filles, vous devez me tirer du nombre, et ne pas mettre en doute la sincérité de ma foi. Et puis votre beauté vous assure de tout. Quand on est faite comme vous, on doit être à couvert de toutes ces sortes de crainte ; vous n'avez point l'air, croyez-moi, d'une personne qu'on abuse ; et pour moi, je l'avoue, je me percerais le coeur de mille coups, si j'avais eu la moindre pensée de vous trahir.

    Corrigé