Notice sur Jacques Arends par Hans den Besten

Jacques Arends est mort. Jacques est mort. On lui avait diagnostiqué une forme de leucémie qui pouvait être soignée ; il fut hospitalisé, mais une complication intervenue lors du premier traitement de chimiothérapie a conduit à ce décès prématuré – à l’âge de 53 ans. Quand nous nous sommes retrouvés pour ses obsèques, beaucoup d’entre nous étaient en larmes. Nous avons encore à apprendre comment faire maintenant qu’il n’est plus parmi nous.

Jacques était né dans le Betuwe, dans la partie orientale de la région des fleuves au centre des Pays-Bas ; il avait fait ses études secondaires à Nimègue, toute proche, où il avait fréquenté le Collège Canisius. Modeste comme il l’était il ne nous avait jamais dit qu’il avait été parmi les meilleurs élèves de sa promotion. Mais vous avez appris cela à ses funérailles !

Après le lycée, il fut alors au Delft Institute of Technology, mais comprit vite que là ne résidait pas son avenir. Il se reconvertit alors dans les Lettres et étudia le néerlandais et la linguistique à l’Université Catholique de Nimègues (maintenant l’Université Radboud). En 1989 il soutint sa thèse de doctorat « Syntactic developments in Sranan : creolization as a gradual process » (sous la direction de Pieter Seuren) – ce qui lui assura immédiatement une place dans les études créoles, mais pas tout de suite un poste à l’université. Cependant, après deux années pendant lesquelles il enseigna le néerlandais – entre autres à la School of Translation Studies de Maastricht – il put obtenir une allocation de l’Académie Royale des Arts et des Sciences (KNAW) pour continuer sa carrière en linguistique à l’Université d’Amsterdam au Centre des Etudes Créoles autour de Pieter Muysken. Jacques ne devait plus quitter ce lieu – sauf pour quelques vacances bien sûr ou pour se rendre à des colloques de créolistique.

Je me souviens de lui comme d’un collègue très agréable, parfois obstiné mais toujours modeste, prenant de temps à autre un visage sévère mais qui pouvait facilement se transformer en un sourire, préparant soigneusement ses cours, se consacrant entièrement aux études créoles, et spécialement à l’étude des créoles surinamiens. Ce fut ainsi tout naturellement qu’on l’invita à devenir membre du Groupe Européen de Recherches en Langues Créoles. Quand les données nouvelles sur la traite transatlantique des esclaves furent disponibles, il comprit immédiatement leur importance pour la reconstitution de la genèse des créoles surinamiens. Ce fut son domaine principal de recherche toutes ces dernières années et il achevait la rédaction d’un livre sur ces questions quand il mourut.

Les colloques d’études créoles ne seront plus les mêmes sans lui. Nous le regrettons profondément.